Avec un univers pour le moins sombre et très tactique, il aura fallu attendre dix-neuf ans avant de voir les licences de Blizzard recevoir une nouvelle bouffée d’air frais grâce à Overwatch. FPS compétitif marchant sur la même voie d’un Team Fortress (et loin d’ailleurs de s’en cacher), les papas de Warcraft renouvellent leurs gammes avec ce monde transmédia qu’ils n’avaient encore jamais défriché. Fort de leur domination dans tous les genres auxquels ils se prêtent, les développeurs de Blizzard ont pris le risque de s’attaquer à gros et où la place est toujours plus exiguë. Non content de tout oser, le pari d’un jeu uniquement multijoueur est d’autant plus téméraire. L’occasion nous est donc donnée d’examiner si le développeur californien assure toujours le coup, ou non.

 

Overwatch est donc un multijoueur compétitif à la sauce FPS où douze joueurs s’affrontent en équipe de six parmi un panel de personnages des plus riches, puisque nous avons la possibilité de choisir entre vingt-et-un combattants aussi diversifiés qu’originaux. Sur douze cartes hautes en couleurs et quatre modes de jeu bien connus des amateurs du genre, il faudra en deux manches gagnantes au choix capturer une série d’objectifs, prendre le contrôles de zones successives, escorter un convoi ou un mode MME des plus classiques. Le rythme reste dans tous les cas en diptyque : pendant qu’une équipe joue l’offensive, l’autre se contentera d’être sur la défensive.

 

Un univers transmédia loin des ténors de Blizzard

 

Pour ce qui est de l’aspect narratif, le titre fait fi de tout scénario et background. Il faudra dans le cas présent regarder les épisodes de la série, des plus réussis par ailleurs. Il conviendra aussi mettre la main sur quelques comics, dont certains sont sortis, pour les plus curieux de l’histoire du jeu et de l’origine physique ou comportementale de certains acteurs d’Overwatch. Une technique commerciale assumée mais qui ne prend pas ses fans pour des pigeons, car les comics sont d’une grande qualité graphique, à l’instar de la série animée. Pourtant, force est de constater que l’on s’éloigne très vite d’une histoire sombre à la sauce World of Warcraft. Blizzard tend en effet à s’adresser à un plus large public quitte à jouer dans le coloré niais, comme en démontre le tout premier épisode consacré au Soldat 76.

 

Accessibilité et appréhension

 

Comme l’ensemble des productions du studio californien, Overwatch est une nouvelle fois un modèle d’accessibilité. Avec des mécaniques très bien rôdées et à la portée du premier venu comme au professionnel du FPS, le titre réussit à convaincre aussi bien le néophyte de l’inconditionnel. Les interfaces et le tutoriel favorisent une appréhension immédiate de la licence : chaque personnage se range ainsi dans une catégorie bien précise (quatre catégories au total : offensif, défensif, support ou tank). De même, chaque avatar dispose de compétences différentes ainsi que d’une arme unique qui appellent à une stratégie différente sur le champ de bataille. Et là réside toute la prouesse du Gameplay de Blizzard : une appréhension certes simple mais difficile à maîtriser. Sans doublon ou répétitions, chaque personnage impose une compréhension différente et une tactique alternative à manipuler avec minutie et précision.

 

Les compétences font le gros des affrontements, ayant tendance de plus à simplifier et à casualiser les affrontements. Nous pensons particulièrement au Soldat 76 dont l’atout le permet de défourailler automatiquement tous les ennemis dans son champ de vision, réduisant largement la part de skills en matière de technicité et de précision. De quoi faire rager quelques aficionados d’un FPS où technique rime avec réussite. Mais ce problème aurait pu échapper à notre regard critique si ce genre d’abus dans les atouts n’était réservé qu’à un seul personnage. Or, les autres avatars possèdent des compétences tout aussi abusives : ressusciter les morts, lancer une pluie de roquettes, voir à travers les murs… En outre, celles-ci peuvent réussir à inverser totalement la tendance pour peu qu’on sache a minima s’en servir. Ce n’est pas sans créer quelques crises de nerfs quand on tenait une avance sur l’équipe adverse. Cette particularité dans le Gameplay, loin de faire redescendre le rythme des affrontements, n’est pas pour autant bien vu de la part des PGM des FPS.

 

L’action n’est pourtant jamais brouillonne et les affrontements restent d’une incroyable fluidité. Malgré par instants un rythme qui s’essouffle, la gestion de la caméra est impeccable et favorise une lisibilité agréable lors des gunfights. On reprochera néanmoins une killcam parfois hasardeuse et qui n’est pas là pour redonner du rythme à des phases parfois un peu plates. Elle fera vite office de cache-misère des temps de chargement avec une réapparition de son personnage.

 

Tactiques, stratégies et équipes soudées

Inutile de préciser que tout l’intérêt du jeu repose aussi sur une équipe soudée et solidaire. Personne ne trouvera une expérience agréable s’il est entouré de petits nerveux qui veulent la jouer solo et foncer dans le tas. En cela, les interfaces qui précédent le lancement de la partie sont présentes pour le rappeler. En effet, lors de la composition des équipes, des petites indications permettent de voir quel personnage il serait judicieux de prendre avant de s’aventurer sur le champ de bataille. On voit alors quel collègue a pris quel personnage, et de quelle catégorie. On ne saura que trop vous conseiller de toujours vous munir d’un tank ou d’un support et d’étayer le reste avec une bonne répartition de personnages défensifs et offensifs pour assurer une consolidation à votre team. Il sera dans tous les cas possible de pouvoir changer de personnage en cours de jeu dans les zones de spawn pour ré-aiguiser votre stratégie.  Un véritable équilibrage a été apporté par Blizzard, rendant chaque personnage aussi utile qu’un autre durant les combats.

 

Des maps diverses et réussies

 

Le level design et la réalisation artistique des maps sont quant à eux une franche réussite. Pas d’une grande beauté, Blizzard assume néanmoins ce parti-pris avec des décors feutrés proches d’un dessin d’animation et d’une ambiance presque enfantine. Les environnements, variés, usent d’inspiration diverses : en passant par les quartiers londoniens aux parcs japonais, sans oublier un détour par les côtes maritimes africaines. Les maps impulsent des combats aussi bien horizontaux que verticaux, proposant des petits escarpements et des endroits vicieux propices à des guet-tapants. De même, chacune est suffisamment bien travaillée pour que chaque personnage puisse en bénéficier pour sa stratégie : que ce soit la voie des airs, les hauteurs, les escarpements ou les grandes voies bien ouvertes, le développeur californien a extrêmement bien peaufiné ses maps au profit d’un épanouissement total quel que soit son avatar.

 

On regrettera cependant des modes trop classiques et peu nombreux pour imposer une réelle plus-value dans le plaisir de jeu. Overwatch manque clairement de folies et de cachet pour réellement marquer l’univers du FPS. Les idées sont bonnes mais ne sont pas non plus transcendantes, les affrontements finissent par se répéter et à manquer de diversification malgré une pluralité des approches et des techniques à adopter. D’autre part, la structure buy to play du titre n’est pas sans faire réagir. Overwatch se munie en effet de microtransactions pour l’aspect esthétique du jeu (nouvelles couleurs, des animations supplémentaires, d’autres vêtements etc.). Cela ne nuit certes pas à l’expérience de jeu face à des joueurs qui auraient pu être abusés en échange de quelques deniers, mais ce n’est pas une politique que nous apprécions particulièrement. L’absence d’un mode classé n’arrange pas l’affaire et finalement, l’intérêt d’une progression est absent au bataillon.

 

Au final, Overwatch reste un FPS compétitif sympathique et classique, trop sobre pour être attachant et manquant cruellement d’un véritable cachet. Néanmoins, le travail apporté à la technicité, à la maîtrise du genre qui n’avait jamais été exploré par le studio Blizzard, d’un équilibrage et d’un système transmédia réussi, font du titre une petite réussite. On regrette toujours la simplicité de la licence et un manque de contenus qui pourraient transcender l’expérience de jeu. Une légère déception apparaît une fois la manette lâchée.

En conclusion

6/10
Pour
  • + Un univers coloré et feutré
  • + Une technique des plus réussie
  • + Une maîtrise du genre
  • + Un panel varié de personnages
  • + L'équilibrage au top
  • + Un univers transmédia intéressant
  • + Le Level Design des maps
Contre
  • - Une certaine infantilisation de l'univers Blizzard
  • - Un manque de variété
  • - Un manque de folies assez frustrant
  • - Un rythme qui s'essouffle souvent

Overwatch est un jeu honnête avec des mécaniques extrêmement travaillées et un travail minutieux sur l'équilibrage. Pourtant, Blizzard nous a habitué à mieux de sa part. On était en droit de s'attendre à un nouveau standard du genre et d'un renouveau du genre FPS. Or force est de constater que le tout dernier du studio californien est certes un jeu plaisant mais pas non plus transcendant. Dommage, car le titre peut bénéficier d'un apport commercial assez conséquent avec les comics et la série animée...